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On ne sera jamais Alceste
Depuis 1680, la Comédie-Française a donné près de 2 500 représentations du « Misanthrope » et il n’est pas un acteur de cette Maison qui n’ait travaillé ou Philinte ou Alceste pour préparer ses concours.
Cette pièce est un matériau inépuisable au travail du jeu et à la direction d’acteur. Louis Jouvet, dans ses cours au Conservatoire dans les années 1940, disait à Michel, un de ses jeunes élèves:
« On ne sera jamais Alceste. Alceste est un personnage qui existe avant nous, et qui existera après nous. Quand tu seras un grand comédien et un grand homme, tu joueras Alceste, mais tu ne seras pas Alceste ; tu mourras et Alceste vivra. »
La metteuse en scène Lisa Guez se saisit ici de ce cours d’interprétation et l’offre à trois acteurs confirmés de la Troupe qui retraversent les travers d’apprentis et font revivre les leçons enflammées de Jouvet. « Demander à des comédiens accomplis de se mettre dans la peau d’élèves d’une vingtaine d’années qui se trompent ou peinent à maîtriser leur souffle, c’est à cet endroit que se situe la pure composition » dit-elle lors de la création du spectacle en 2022.
Acte I. Scène 1. Sur scène, Michel et Léon répètent inlassablement la première scène de la pièce sous le regard inquiet de leur professeur. Jouvet arrête le jeu, relève un «o » trop ouvert, une intention trop raisonnée, le sens d’une « respiration indignée », il s’acharne à faire naître l’exigence infinie du théâtre.